Le cheminement de ces deux personnages, la vieille femme et l’enfant et leurs interactions, mettront en lumière plusieurs thèmes :
Le voyage
Ce voyage se veut autant physique qu’intérieur. Tout déplacement est une école de patience. Le voyage est souvent une pause qui permet d’interroger et retrouver le centre et le sens de notre vie. En Inde, les moyens de transports lents, incertains, aléatoires et risqués transforment chaque déplacement en pèlerinage.
Dans certaines cultures, un trajet (en train, en bus, à pied) s’estime non pas en kilomètres mais en heures, en jours, en semaines, en rencontres et en échanges.
Ici la démarche lente et difficile du personnage Cybèle rompt avec la recherche continuelle de notre monde à plus de célérité, d’efficacité.
Cette lenteur laisse alors la place, on l’imagine, à un mouvement intérieur et intime, aux vagabondages de la pensée chargée d’histoires de cette vieille femme, créant le mystère, ouvrant sur notre propre imaginaire. Notre rêverie s’harmonise alors sur ce même tempo.
La transmission
Cette transmission est symbolisée ici par la lumière que porte la « mère veilleuse », Cybèle.
La passation est par ailleurs incarnée physiquement, l’objectif pour l’enfant est de se mettre à marcher à son tour.
Mais il s’agit aussi de transmission de valeurs, de mémoire (sans mémoire le temps disparaît) et de continuité, sans figer l’acquis : l’héritage transmis est à chaque fois, retravaillé, réinterprété, métamorphosé pour être intégré.
La relation entre les deux personnages interroge aussi la forme de la transmission : ici la « mère veilleuse » est muette, l’enseignement ne passe pas par l’oralité.
La transmission s’expérimente à travers le chemin parcouru ensemble, à deux, par le rythme imposé par les pas de la vieille femme, et par un regard différent sur le monde qui les entoure : l’un et l’autre expérimentent le monde à travers des vues qui se nourrissent mutuellement, Cybèle a le regard fixé sur les quelques mètres au-delà de ses pieds, quand Poti, juché sur ses épaules, peut voir plus largement le chemin à parcourir…
Le désir d’apprendre et de grandir pour « prendre sa place » à son tour
Le cheminement intérieur de cet enfant dans ce spectacle est mu par l’envie et la nécessité de s’émanciper, de faire ses premiers pas dans ce monde, de se mettre en route à son tour.
Il s’agira aussi de questionner ce moment sensible de passage : ces ressentis ambivalents entre exaltation et hésitation, entre le désir de ce vers quoi l’on tend et la peur de l’inconnu ; la peur de la mise en mouvement qui passe nécessairement par un état de déséquilibre. Cette fragilité qui fonde toute expérience et toute croissance…